JAPON: LE SOLEIL ROUGE

JAPON: LE SOLEIL ROUGE

Pourquoi j'aime le Japon

 

     Une question que certaines personnes me posent souvent: quelles sont les raisons pour lesquelles je me suis intéressé au Japon et pourquoi j'aime autant ce pays aujourd'hui...


       A l'origine, rien ne me prédisposait à porter un quelconque intérêt pour ce lointain pays. Mes parents n'étaient pas de grands voyageurs, loin s'en faut. Donc ce ne sont pas leurs histoires de vacances exotiques qui m'ont donné l'envie d'y aller. Je me souviens que dans mon enfance, j'aimais un peu les combats et l'action. Rien de bien violent, je vous rassure... quoique, parfois!  C'était juste ce besoin de domination qui anime le corps et l'esprit des garçons "élevés au grand air". Des histoires de samouraï, de ninja, de yakuza ont parfois servi d'exemples aux mises en scènes que l'on se faisait à l'époque, mais pas plus que celles des gendarmes et voleurs ou d'indiens et cowboys....


      Je suis d'une génération pré-télévision avec 1500 chaines numériques, donc je n'ai pas été directement imbibé à la naissance par les dessins animés nippons... que j'ai quand même un peu regardés avec mes enfants quelques années plus tard. Les mangas n'ont pas non plus fait partie de mon quotidien de lecture, ces bandes dessinées avec une image par page ne sont arrivées en France que bien après mon enfance.


      Plus tard, ce ne sont pas non plus mes études qui m'ont amené à disserter ou plancher sur le pays du soleil levant...


      Alors, pourquoi le Japon?


      Tellement de gens sont épris de telle ou telle région de France qu'ils considèrent comme le plus beau pays du monde... alors qu'ils n'ont pour certains jamais franchi les frontières de l'hexagone.
D'autres ne jurent que par l'Espagne, l'Italie, ou plus au sud, le soleil, la mer... ou d'autres destinations pour la chaleur, la fraicheur. Globalement pour ce que certains globe-trotters considèrent comme leurs paradis... pendant les vacances, bien sur.


      Donc, j'ai envie de leur dire... "moi, j'aime le Japon, et alors...??"


      En ce qui me concerne, c'est le hasard du monde du travail qui a un jour mis le japon dans ma vie... L'entreprise dans laquelle je travaillais a été mise sur le marché, vendue... et rachetée par un consortium japonais qui en a fait sa tête de pont en France... puis en Europe. Donc, bien sûr, la maison mère a tenu à modifier nos méthodes de travail et a expatrié des conseillers avec qui j'ai été amené à travailler. Cette expérience m'a tout d'abord intrigué puis fasciné. Ce qui m'a le plus étonné, c'est leur capacité de travail, ce sens exacerbé du devoir: on ne part pas tant que le travail n'est pas terminé... et bien fait! La barrière de la langue étant relativement aplanie par l'usage de l'anglais, j'ai assez longuement discuté avec certains d'entre eux pour pouvoir en conclure que cette sorte de volonté de l'excellence devait leur être inculquée depuis la naissance, peut être même à la conception! lol!
"Tout ce qui doit être fait mérite d'être bien fait"... Une révélation pour tous ceux qui, comme moi, commencent la journée en refaisant le monde à la machine à café....


      Je me disais quand même que ces exceptionnels travailleurs acharnés que je côtoyais chaque jour, devaient avoir été triés sur le volet et faisaient partie de l'élite de la société. Ils étaient déportés en mission spéciale pour montrer aux pauvres ignares moyenâgeux comment travailler efficacement...


      Quelques temps plus tard lorsque j'ai eu l'opportunité de faire mon premier déplacement professionnel au Japon, j'ai vite déchanté: dans cette entreprise, ils étaient tous comme les extra-terrestres qui nous avaient envahis. Pire, c'était tout le pays qui leur ressemblait. Un autre monde. C'est le sentiment général qui restera à jamais dans ma mémoire et qui m'a donné l'envie irrésistible d'y retourner.


      Un univers ou la propreté n'existe pas car il n'a jamais connu la saleté, ou les trains n'arrivent pas à l'heure mais pratiquement à la seconde... certains usagers en profiteraient même pour vérifier le bon fonctionnement de leur vieille montre... Un pays ou l'ordre, le respect et le travail font partie des valeurs essentielles. Là ou la famille et l'entreprise se confondent souvent, étroitement liés dans la même quête de réussite socio-économique.


      Un monde ou les avancées sociales ne se font pas à grands renforts de grèves de fonctionnaires paralysantes avec prises en otages des usagers mais par un travail acharné, précis et efficace rémunéré à sa juste valeur en fonction des bénéfices réalisés par les entreprises.


      A l'époque subsistait encore la notion de "travail à vie". Sorte de contrat "gagnant - gagnant" ou l'entreprise assurait à l'employé un emploi durable en contrepartie d'un travail sans limite, sinon celle de l'excellence. Des générations d'employés ont ainsi travaillé sans relâche, sans prendre plus d'une semaine de vacances par an afin de contribuer à assurer leur avenir à travers la prospérité de leur entreprise. Cela a évolué depuis car certains salariés n'hésitent plus aujourd’hui à changer d'entreprise, mais c'est souvent pour travailler encore plus!


      La somme de tous ces efforts conjugués a amené à ce minuscule archipel à se constituer une bulle économique lui permettant de rivaliser avec les grandes puissances industrielles et financières de cette terre... et parfois même à les dépasser dans beaucoup de domaine. Même après l'éclatement de cette bulle, les principes fondamentaux n'ont toujours pas changés.


      J'ai également pu tester le sens de la fête "post labeur acharné" des japonais quand on se retrouve ensemble, entre collègues travaillant sur le même projet après une dure journée pour boire un... non,  plusieurs verres. Le premier toast est souvent porté à la réussite du travail accompli: on trinque en disant "Otsukaresama", ce qui pourrait se traduire par: "à votre fatigue"! Est ce imaginable en France?


      Si on a faim, on peut manger à toute heure dans n'importe quel restaurant. Quand on entre dans l'établissement, on est accueilli par des "Irashaimasse!!" tonitruants nous souhaitant la bienvenue, le service est toujours parfait, la nourriture excellente et tout le monde nous remercie chaleureusement d'être venu quand on repart: "Domo Arigato Gozaimassu!".
      En France, si je repas traine un peu, on nous met pratiquement dehors en nous disant "c'est fermé!" même si la porte est encore ouverte...


      Dans les magasins, les vendeurs sont toujours disponibles et prêts à tout pour que le CLIENT reparte satisfait. Une fois, j'ai même vu un vendeur paniqué téléphoner à un magasin concurrent pour demander si il possédait l'objet que je recherchais, après avoir retourné tout son stock sans succès...La désolation extrême se lisait sur son visage: l'expression de celui qui a failli à sa mission.
En France, j'ai parfois l'impression d'être le champion des casse-pieds lorsque je demande un renseignement... Si je réussi à dénicher un vendeur qui ne soit pas débordé par... rien, et qui bien souvent, visiblement ne s'y connait pas plus que moi!


      Aux caisses des supermarchés, les employés trient et rangent consciencieusement les denrées achetées dans des paniers en énumérant le nom du produit ainsi que le prix qui s’affiche sur leur écran...
      Quand je vois les caissières de mon carrefour habituel balancer mes produits sur le tapis de leur caisse, j'ai envie de hurler!!!!


      En fin de soirée prolongée, il m'est arrivé de me retrouver dans des lieux un peu "glauques" et ténébreux, dans la pénombre downtown de Osaka. L'atmosphère semblait propice aux embrouilles, les gens rencontrés peu engageants, mais je n'ai jamais eu aucun problème. Il y avait beaucoup de rabatteurs qui voulaient m'entrainer dans des bars louches... "Je ne m'occupe pas de vos affaires, vous me laissez tranquille". Cela semble être le code nocturne de cette ville. S’ils devenaient pressant, je restais courtois et disais simplement que je n'étais pas intéressé. Cela n'est jamais allé plus loin.
      A Paris, dans des situations analogues, le simple fait de croiser un regard suffit parfois pour partir en baston!

 

    Si on parle d'insécurité, le Japon est un pays assez exceptionnel. Je ne sais pas si le vol existe, mais les japonais ne le craignent pas. Je vais de temps en temps  dans un fast food style Starbuck coffee ou Moss Burger. Chaque fois, je vois des sacs, des smartphones posés sur des tables, sans surveillance... ils ont été posés là par leurs propriétaires pour "garder la place"... Et personne ne prend ni la place ni le sac ou le smartphone!

 

     Un soir, après le travail, je rentrais en train. J'avais posé mon ordinateur portable sur le filet au dessus des sièges et je discutais avec des collègues qui effectuaient le même trajet... A la gare d'arrivée, on est tous descendus... mais pas mon ordinateur. Le temps de m'en rendre compte et le train était reparti. Devant mon inquiétude, mes collègues m'ont rassuré en allant au guichet du contrôleur du quai. En une minute, il avait téléphoné à son collègue roulant et je n'avais qu'à attendre... Mon ordinateur a été retrouvé, confié au contrôleur de quai de la gare suivante puis a pris le train dans l'autre sens... Une demie heure après, il m'était remis en me remerciant de faire confiance à la compagnie Japan Railways...

 

     Un soir, on dînait en famille dans un pub "Irlandais" sur Midosuji-dori à proximité de Shinsaibashi. On avait commandé beaucoup de petits plats et la table était pratiquement couverte d'assiettes... et de quelques pintes également. j'ai réglé l'addition et on est partis à pieds prendre le métro. Ce n'est qu'une fois assis que Machiko s'est aperçue qu'elle avait oublié son Iphone sur la table, dissimulé par les assiettes. Il y avait foule dans le bar et en partant, j'avais vu d'autres personnes s'installer avant que la table soit débarrassée. Nous sommes quand même revenus au pub et nous avons été accueillis par le sourire visiblement soulagé de la réceptionniste à qui les clients suivants avaient donné le téléphone. Là aussi elle nous a remerciés d'être venus dans son établissement...


      Je n'ai jamais vu un pays plus cool en matière de circulation routière. Cela ne roule pas vite, la vitesse maximum autorisée est limitée à 80 Km/h hors agglomération, sur route, autoroute, hors piste... c'est partout pareil. Même si il n'y a personne. Et pratiquement tout le monde respecte ! Bref, parfois même moi je réussis à me contenir dans ces limites indécentes pour un français réputé comme hooligan de la route.  Cependant, j'ai toujours aujourd'hui le problème de la conduite du « mauvais côté »! Une anecdote qui m'est arrivée dernièrement dans une petite route de campagne: le "naturel" avait repris le dessus et je roulais tranquillement à droite, perdu dans les méandres de mes pensées... jusqu'à ce que je rencontre un autochtone qui s'est pratiquement excusé en me signalant que je n'étais pas à la bonne place, après avoir fait un écart pour éviter la collision... Imaginez un cas similaire en France!

 

    Quelques mots sur l'hygiène... et en particulier les équipements domestiques. Je commence par les toilettes, lieu peu sympathique en général mais qui au Japon deviennent des endroits accueillants. L'abattant qui s'ouvre automatiquement lorsque vous fermez la porte, la lunette délicatement chauffée, la petite musique qui retentit lorsque l'on s'assoit, le "poste de pilotage" permettant d'actionner des jets d'eau à la température et au débit réglables à volonté pour se nettoyer, un séchage à l'air chaud... Tellement agréable que j'en ai ramené deux qui équipent mon habitation française.

       La salle de bains n'est pas en reste avec un bain type "onsen" à température constante et jacuzzi et la douche avec une eau à la température réglable électroniquement au dixième de degré. Ce sont des équipements qu'il me tarde d'importer en France.


      Lorsque je rentre dans "mon pays", j'ai comme le sentiment de redescendre dans une sorte de poubelle. La première vision des employés des douanes et l'amabilité des agents de l'immigration me rappelle vite ou je suis... les images des murs tagués, les mégots de cigarettes au sol, des papiers volant au vent sur les trottoirs, les accents vindicatifs de notre jeunesse désœuvrée, tout cela me ramène instantanément à la triste réalité... et m'incite à travailler d'avantage pour repartir au plus tôt.


      Voilà en quelques mots pourquoi le Japon occupe une telle place dans ma vie, sans parler de mon épouse japonaise, de notre fille, de nos amis là-bas, des paysages, des temples et jardins posés comme des oasis dans des villes tentaculaires... de tant d'exemples et de leurs contraires. Un jour, peut être que j'écrirai un roman...

 

     En attendant, je vous invite à découvrir les articles que je partage sur mon blog: "Bienvenue au pays du Soleil Rouge!."



13/01/2012
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